Les Abbeys constituent une ethnie de la Côte d'Ivoire, dont la population est principalement établie dans la région d'Agboville, située à 57 km au nord d'Abidjan, et également dans la sous-préfecture de N'douci. Au cœur de la culture des Abbeys, les mariages traditionnels revêtent une signification profonde, symbolisant bien plus qu'une simple union entre deux individus. En fait, ces mariages peuvent parfois impliquer non seulement deux, mais jusqu'à quatre familles, en raison du poids des alliances familiales.
Dans les lignes suivantes, nous vous révélons tout ce que vous devez savoir sur les mariages coutumiers au sein de la communauté Abbey.
Le mariage traditionnel chez les Abbey : Les fiançailles
Dans le cadre du mariage traditionnel au sein de la communauté Abbey, les fiançailles marquent un moment significatif. C'est à ce stade que les deux familles se réunissent chez les parents de la fiancée. À la suite de consultations étendues, l'approbation de la belle-famille est obtenue. Une fois cet accord obtenu, le fiancé offre des dons en nature, comprenant généralement de la liqueur (souvent du gin), de la poudre de tabac et deux paquets de cigarettes, ainsi qu'une somme symbolique de 150 F CFA.
Durant cette période des fiançailles, le fiancé participe aux charges de la belle-famille, prend en charge les frais médicaux de la fiancée et participe également aux travaux agricoles pour les beaux-parents. Après les fiançailles, il est attendu que la fiancée atteigne l'âge de la puberté, si elle ne l'a pas encore atteint, avant que la dot ne soit remise. Cette dot, symbolique et significative, officialise le statut de la fiancée en tant que future épouse du prétendant.
Le mariage coutumier chez les Abbey : La dot
Lorsque la fiancée atteint la période de la puberté, un moment crucial se présente. Le beau-père prend l'initiative d'envoyer expressément un émissaire au prétendant, le convoquant à honorer son engagement de verser la dot, conformément aux normes et traditions en vigueur. Cette étape revêt une importance capitale, étant donné que le mariage scelle l'union de deux familles. La cérémonie de remise de la dot se déroule en présence des membres élargis des clans des deux futurs conjoints.
Après les échanges courtois initiaux, la fiancée prend la parole afin de donner son accord devant l'assemblée présente. Les éventuelles objections provenant d'autres membres de la famille, le cas échéant, sont résolues grâce à des présentations de cadeaux. Cette étape sert à harmoniser les opinions et à renforcer l'unité.
Ainsi, la famille du fiancé peut procéder à la remise formelle de la dot.
Cette dot, symbolique et porteuse de significations, se compose de :
- une gerbe de tabac comprenant cinq feuilles,
- un flacon de tabac en poudre,
- deux paquets de cigarettes,
- sac de sel pesant 25 kg,
- deux piles de poissons fumés,
- une bouteille de Gin royal,
- une somme de 300 F CFA et
- un gage en or pesant 52 grammes.
Ce gage en or se matérialise à travers quatre bijoux distincts : deux bijoux plats appelés "KTECHIN" et deux bijoux en forme de poissons, nommés "EGBELE".
Ces bijoux en or reçoivent une certification émanant d'un expert en joaillerie spécialement qualifié pour cette tâche. Cette expertise vise à confirmer avec précision le poids, la qualité et le nombre de carats de ces objets qui sont offerts en gage. Il convient de noter que ces bijoux en or revêtent une importance capitale, au point qu'ils constituent le noyau central de la dot. En effet, sans ces bijoux, la fiancée ne peut être formellement fiancée selon les coutumes en vigueur.
Une fois cette étape accomplie, le père du fiancé choisit un père spirituel pour la fiancée, tandis que le père de la fiancée fait de même pour le fiancé. Ce choix symbolique annonce également avec solennité la date prévue pour la célébration du mariage proprement dit. Cette date est déterminée de manière concertée par les deux familles, ce qui marque le début des préparatifs pour le mariage.
Les préparatifs du mariage coutumier chez les Abbey
Préparatifs du côté du fiancé
Avec la date du mariage désormais fixée, le fiancé, épaulé par ses frères et ses amis, se lance activement dans les préparatifs de la maison conjugale. Ils entreprennent des réparations nécessaires et procèdent à l'aménagement de la chambre nuptiale. Leur engagement ne s'arrête pas là : ils se mobilisent également pour rassembler tous les éléments nécessaires au repas de noces. Cette liste comprend une variété d'éléments tels que:
- le gibier,
- le poisson,
- l'igname,
- l'huile de palme,
- le vin de palme,
- les cure-dents,
- les draps,
- les couvertures en coton ou en laine, ainsi que
- le bois de chauffage.
Cette phase de préparation est empreinte de dévouement et d'anticipation, témoignant de l'engagement du fiancé et de son entourage à faire de ce jour une célébration mémorable.
Pendant ce temps, la fiancée se dédie à se reposer, à prendre soin d'elle et à maintenir une alimentation saine pour être au summum de sa forme le jour tant attendu. Son bien-être physique et son apparence sont des priorités afin de rayonner lors de cette journée spéciale.
En parallèle, les parents de la fiancée se mobilisent pour rassembler la dot de leur fille. Celle-ci comprend une variété d'éléments, notamment des tenues vestimentaires, des pagnes, des bijoux et des ustensiles de cuisine. Chaque élément est soigneusement choisi pour compléter cette collection précieuse qui symbolise l'entrée de la fiancée dans une nouvelle phase de sa vie.
Préparatifs du côté de la fiancée
La fiancée elle-même joue un rôle actif dans les préparatifs. Elle sélectionne avec soin ses demoiselles d'honneur pour la cérémonie, tandis que son père désigne une dame de compagnie qui est généralement sa cousine germaine. Cette dernière joue un rôle spécial, étant chargée de porter la malle contenant les pagnes le jour du mariage. Chacun de ces choix est empreint de considérations affectueuses et symboliques, ajoutant une touche personnelle à cette période pré-mariage.
Le jour précédant le mariage, la fiancée se fait tresser les cheveux par une coiffeuse qui doit faire preuve de patience et avoir une grande habileté manuelle. En reconnaissance de son travail, la coiffeuse est récompensée par une bouteille d'huile rouge, une igname précoce, une portion de gibier et une somme de trois cents francs (300 F CFA). Cette tradition souligne l'importance du rôle de la coiffeuse dans la préparation de la fiancée pour le grand jour, tout en témoignant du respect et de la reconnaissance envers son savoir-faire.
La cérémonie du mariage coutumier chez les abbeys
La cérémonie du mariage traditionnel chez les Abbeys s'étend sur quatre jours consécutifs, chacun étant marqué par un nom spécifique : "Episso", "Echo", "Ekichi" et "Ovo".
La veille du premier jour, des jeunes individus, amis et parents du marié se rendent dans la cour de la mariée. Là, ils l’enlèvent et la transportent jusqu'à la cour familiale du marié en courant. Sur le chemin, les frères de la mariée les ruent de coups et si jamais ils arrivent à la maison du marié, cela illustre que le mari est prêt à protéger et à défendre son épouse.
Procession du cortège de la mariée
Le jour tant attendu, également connu sous le nom d'Episso", la mariée se pare de tous ses éléments distinctifs, incluant sa belle tenue traditionnelle abbey, ses bijoux en or, les perles et les sandales. Dans une procession significative, elle quitte sa demeure, entourée de ses filles d'honneur qui portent habilement sur leur tête la précieuse dot de la mariée. Cette dot comprend des cuvettes de pagnes, les bijoux soigneusement sélectionnés et les ustensiles de cuisine essentiels pour leur vie à venir.
Sa dame de compagnie, désignée pour la soutenir tout au long de la cérémonie et pendant les trois jours qui suivent la fin de l'événement, est à ses côtés. Les garçons de compagnie de la mariée participent également à cette procession, symbolisant le soutien et l'accompagnement de l'ensemble de son entourage dans ce moment significatif.
Ces garçons de compagnie, qui jouent également le rôle de gardes du corps, restent aux côtés de la mariée tout au long du trajet qui sépare les résidences des futurs mariés. Prévoyants et vigilants, ils sont équipés de fusils afin de prévenir toute éventualité. Leurs préoccupations incluent la protection de la mariée contre des situations telles qu'un enlèvement par un prétendant déçu ou insatisfait, un éventuel vol par des malfrats cherchant à s'emparer de la dot ou d'autres situations imprévues. Leur présence assure une sécurité rassurante, permettant à la mariée et à son cortège de se déplacer en toute confiance.
Malgré la présence de ces gardes du corps, l'ambiance demeure empreinte d'une allégresse générale. Les filles d'honneur ainsi que la dame de compagnie participent activement, chantant des airs de célébration en l'honneur du couple.
Arrivée du cortège nuptial chez le marié
Dans la cour familiale du marié, où se déroule la cérémonie, tous les membres des deux familles sont présents et prêts. À ce moment crucial, un représentant de la famille de la mariée vient informer la famille du marié de l'arrivée imminente du cortège nuptial. Ce cortège est accueilli avec des acclamations, des chants et des danses, orchestrés par des femmes, dans une atmosphère de joie collective.
Un aspect particulier de la cérémonie mérite d'être souligné : une fois l'accueil terminé et que le cortège nuptial est reçu avec enthousiasme, une attention particulière est portée à la malle de pagnes que la dame de compagnie porte sur sa tête. Tant que cette malle n'a pas été posée à terre, personne ne peut s'asseoir.
Une tante du marié joue un rôle significatif à ce moment. Elle offre un gage, fréquemment un foulard, à la porteuse de la malle. Ce geste symbolique marque un moment de transition où la porteuse de la malle accepte de finalement poser cette fameuse malle à terre. Une fois que cela est accompli et que la malle est posée, l'assistance a alors la possibilité de se rasseoir et de poursuivre la cérémonie.
La mariée, occupant une place centrale, est stratégiquement assise de manière à être visible pour l'ensemble des participants. En revanche, le conjoint est absent physiquement et reste en quelque sorte invisible. À sa place, un de ses cousins germains joue le rôle du marié tout au long de la cérémonie. Cette représentation symbolique souligne la transition vers la nouvelle union, tandis que le cousin germains incarne temporairement le rôle du futur conjoint en tant que symbole de l'engagement à venir.
Déroulement du mariage coutumier chez les Abbey
Avant les échanges de nouvelles, un rituel de lavage des pieds de la mariée est observé. C'est ensuite le moment où chaque camp désigne un porte-parole. Les deux porte-paroles se dirigent vers le centre de la scène, chacun tenant un bâton. Les deux bâtons se croisent au sol, symbolisant ainsi l'ouverture pour les échanges de nouvelles entre les deux familles. Par la suite, une séance de dégustation de vin de palme, offert par la famille du marié à l'ensemble des participants, a lieu. Ensuite, un cousin germain joue le rôle du futur marié en se substituant à lui. Il crée une scène d'embrassades avec la mariée en l'enlaçant trois fois avec son bras gauche. Cette séquence d'embrassades est accompagnée d'ovations enthousiastes de l'assistance, témoignant de la joie et de l'enthousiasme ressentis à l'égard de l'union imminente.
Immédiatement après, une tante du marié utilise de la terre mouillée provenant du fond du vin de palme versé pour enduire délicatement le bas-ventre de la mariée, répétant ensuite le geste avec le véritable marié, qui est assis un peu plus éloigné, presque effacé en comparaison. Tout en effectuant cette action, elle psalmodie des paroles incantatoires visant à invoquer les esprits ancestraux, afin qu'ils accordent leur bénédiction au jeune couple et favorisent l'éclosion d'une progéniture abondante. Ce rituel, c'est celui de la fécondité, en conformité avec les traditions en place.
Les femmes de la famille du marié expriment leur allégresse par des danses festives et en offrant à la mariée des objets emblématiques du quotidien, tels que:
- une corbeille à provisions pour les champs,
- une machette pour les travaux agricoles,
- une hache pour fendre le bois,
- un balai pour la propreté du foyer et un seau pour les soins personnels du mari.
Une fois cette étape accomplie avec succès, les festivités nuptiales prennent place, avec au menu de la purée d'igname à l'huile de palme, communément appelée "foufou", agrémentée de poudre de piment pour l'assaisonnement. À ce stade, une cousine du marié, accompagnée d'autres femmes, apporte le repas de noces et le déguste pour témoigner que les plats sont comestibles et prêts à être partagés.
Par la suite, le repas est partagé entre les différents groupes constituant le cortège. La mariée et sa dame de compagnie prennent place d'un côté, tandis que les filles d'honneur se regroupent de l'autre. Les tantes et les femmes plus âgées qui ont accompagné la mariée bénéficient d'un espace distinct pour savourer leur repas, tandis que les garçons de compagnie sont également servis. Après le repas, la dame de compagnie et les filles d'honneur célèbrent en chantant et en frappant des mains, exprimant ainsi leur joie et leurs louanges pour les mariés. C'est sur ces notes de bonheur et de convivialité que se clôt la première journée des festivités du mariage.
Les deux jours qui suivent sont dédiés aux festins et aux célébrations. Les jeunes forment des amitiés avec les jeunes filles, en particulier les filles d'honneur. Ces liens peuvent même évoluer vers des engagements matrimoniaux.
Les mariés se préparent à leur nouvelle vie de couple
Tout au long de la semaine de la cérémonie, le faux mari reste constamment aux côtés de la mariée, ne la quittant pas d'un pouce. Il la suit même jusque dans sa chambre pour veiller sur elle, car durant cette période, les enlèvements de jeunes épouses sont fréquents ; ainsi, la présence constante du faux mari auprès de la mariée garantit sa sécurité. Le quatrième jour, appelé "OVO", les filles d'honneur se rendent tôt le matin à la rivière pour laver la literie, les draps, les couvertures et autres nattes de couchage utilisés lors des jours précédents.
Après leur retour de la rivière, les filles d'honneur partagent leur dernier repas avec émotion et prennent congé de la mariée en larmes. Désormais, la mariée est sous les soins de sa dame de compagnie et de son faux mari. Pendant encore trois jours, elle reste sur les lieux de la cérémonie, dans la famille de son mari, accompagnée de ses deux compagnons. Le véritable mari peut enfin rejoindre le groupe, mais il ne peut solliciter aucune faveur de son épouse, qui demeure toujours aux côtés de son faux mari.
Les trois derniers jours passés, la mariée, épuisée, quitte la demeure de son mari en compagnie de sa dame de compagnie. À son retour chez ses parents, elle se fait raser la tête, un geste symbolisant sa préparation à une nouvelle vie, et à sa rencontre avec son futur mari avec qui elle va bientôt vivre définitivement. Après avoir passé une semaine auprès de ses parents pour recevoir les derniers conseils et bénéficier de leurs enseignements, la mariée est fin prête à rejoindre son domicile conjugal. À ce stade, elle retrouve son mari légitime, qui lui aussi a la tête rasée, pour entamer ensemble leur nouvelle vie en tant que couple marié.
Une fois l’étape du mariage coutumier terminée, vous pouvez entamer la préparation de votre https://www.monmariageamoi.com/mariage-civil